lundi 20 octobre 2008

Bourses : L'escroquerie actuelle décodée chez Emile Zola (L'Argent)


debut

introduction par Yanick Toutain

Quand certains semblent découvrir l'existence et la puissance du capital financier - tel Frédéric Lordon - dans l'émission de Là-bas si j'y suis de cet après-midi (rediffusion de l'enregistrement du 31 janvier 2007), il est plus que salutaire d'aller relire Zola.
Il nous décrit comment des banquiers (d'obédience distinctes dans le livre) menaient des luttes à mort.

Le processus de vente à découvert qui permet aux escrocs de s'enrichir en période de baisse est au coeur du livre et au centre de l'escroquerie actuelle.
Vendre à découvert permet de vendre ce que l'on ne possède pas (en l'achetant à moindre prix plus tard) pour s'enrichir en période de baisse des cours.

Les imbéciles Sarkozy et Largarde, qui ont fabriqué un airbag de 360 milliards d'euros à l'intention des voleurs de la Banque ont besoin de retourner prendre des cours d'économie - marxiste en particulier.
Qu'ils lisent au moins Zola.

Car, il ne saurait être question de les considérer comme Obama doit l'être : un membre actif de l'escroquerie. En effet, si les liens d'Obama avec la grande banque US sont avérés - Goldman Sachs aux première loges - Sarkozy, lui, est bien plus proche du capitalisme esclavagiste dont le fleuron est Vincent Bolloré.
Nicolas Sarkozy est davantage lié à la pire gangrène de l'humanité : les capitalistes qui rentabilisent l'occupation militaire en faisant travailler les gens pour 20 fois moins que la valeur de leur travail.
Ce capitalisme de gangsters a peu d'intérêts à comprendre réellement la Bourse et ses mécanismes. Le maintien en place des gangsters compradores d'Afrique et des stalino-capitalistes de Chine rapportent bien davantage.


L'ARGENT DE ZOLA chapitre 10 Wiki source (un ; corrigé)
(les mots en gras [YT] servent à faciliter la compréhension des mécanismes de la vente à découvert)

"Ce soir-là, Paris qui veille et qui s’amuse ne parla que du duel formidable engagé entre Gundermann et Saccard. Les femmes, tout entières au jeu par passion et par mode, affectaient de se servir des mots techniques de liquidation, prime, report, déport, sans toujours les comprendre. On causait surtout de la position critique des baissiers qui, depuis tant de mois, payaient, à chaque liquidation nouvelle, des différences de plus en plus fortes, à mesure que l’Universelle montait, dépassant toute limite raisonnable. Certainement, beaucoup jouaient à découvert et se faisaient reporter, ne pouvant livrer les titres ; ils s’acharnaient, continuaient leurs opérations à la baisse, avec l’espoir d’une débâcle prochaine des actions ; mais, malgré les reports qui tendaient à s’élever d’autant plus que l’argent se faisait plus rare, les baissiers, épuisés, écrasés, allaient être anéantis, si la hausse continuait. A la vérité, la situation de Gundermann, du chef tout- puissant qu’on leur donnait, était différente, car lui avait dans ses caves son milliard, d’inépuisables troupes qu’il envoyait au massacre, si longue et meurtrière que fût la campagne. C’était l’invincible force, pouvoir rester vendeur à découvert, avec la certitude de toujours payer ses différences, jusqu’au jour où la baisse fatale lui donnerait la victoire.
Et l’on causait, on calculait les sommes considérables qu’il devait déjà avoir englouties, à faire avancer ainsi, le 15 et le 30 de chaque mois, pareils à des rangées de soldats que les boulets emportent, des sacs d’écus qui fondaient au feu de la spéculation. Jamais encore, il n’avait subi, en Bourse, une si rude attaque à sa puissance, qu’il y voulait souveraine, indiscutable ; car, s’il était, comme il aimait à le répéter, un simple marchand d’argent, et non un joueur, il avait la nette conscience que, pour rester ce marchand, le premier du monde, disposant de la fortune publique, il lui fallait être le maître absolu du marché ; et il se battait, non pour le gain immédiat, mais pour sa royauté elle-même, pour sa vie. De là, l’obstination froide, la farouche grandeur de la lutte. On le rencontrait sur les boulevards, le long de la rue Vivienne, avec sa face blême et impassible, son pas de vieillard épuisé, sans que rien en lui décelât la moindre inquiétude. Il ne croyait qu’à la logique. Au dessus du cours de deux mille francs, la folie commençait pour les actions de l’Universelle ; à trois mille, c’était la démence pure, elles devaient retomber, comme la pierre lancée en l’air retombe forcément ; et il attendait. Irait-il jusqu’au bout de son milliard ? On frémissait d’admiration autour de Gundermann, du désir aussi de le voir enfin dévorer ; tandis que Saccard, qui soulevait un enthousiasme plus tumultueux, avait pour lui les femmes, les salons, tout le beau monde des joueurs, lesquels empochaient de si belles différences, depuis qu’ils battaient monnaie avec leur foi, en trafiquant sur le mont Carmel et sur Jérusalem. La ruine prochaine de la haute banque juive était décrétée, le catholicisme allait avoir l’empire de l’argent, comme il avait eu celui des âmes. Seulement, si ses troupes gagnaient gros, Saccard se trouvait à bout d’argent, vidant ses caisses pour ses continuels achats. De deux cents millions disponibles, près des deux tiers venaient d’être ainsi immobilisés : c’était la prospérité trop grande, le triomphe asphyxiant, dont on étouffe. Toute société qui veut être maîtresse à la Bourse, pour maintenir le cours de ses actions, est une société condamnée. Aussi, dans les commencements, n’était-il intervenu qu’avec prudence. Mais il avait toujours été l’homme d’imagination, voyant trop grand, transformant en poèmes ses trafics louches d’aventurier ; et, cette fois, avec cette affaire réellement colossale et prospère, il en arrivait à des rêves extravagants de conquête, à une idée si folle, si énorme, qu’il ne se la formulait même pas nettement à lui-même. Ah ! s’il avait eu des millions, des millions toujours, comme ces sales juifs ! Le pis était qu’il voyait la fin de ses troupes, encore quelques millions bons pour le massacre. Puis, si la baisse venait, ce serait son tour de payer des différences ; et lui, ne pouvant lever les titres, serait bien forcé de se faire reporter. Dans sa victoire, le moindre gravier devait culbuter sa vaste machine. On en avait la sourde conscience, même parmi les fidèles, ceux qui croyaient à la hausse comme au bon Dieu. C’était ce qui achevait de passionner Paris, la confusion et le doute où l’on s’agitait, ce duel de Saccard et de Gundermann dans lequel le vainqueur perdait tout son sang, dans ce corps à corps des deux monstres légendaires, écrasant entre eux les pauvres diables qui se risquaient à jouer leur jeu, menaçant de s’étrangler l’un l’autre, sur le monceau des ruines qu’ils entassaient.
Brusquement, le 3 janvier, le lendemain même du jour où venaient d’être réglés les comptes de la dernière liquidation, l’Universelle baissa de cinquante francs. Ce fut une forte émotion. A la vérité, tout avait baissé ; le marché, surmené depuis longtemps, gonflé outre mesure, craquait de toutes parts ; deux ou trois affaires véreuses s’effondraient avec bruit ; et, d’ailleurs, on aurait dû être habitué à ces sautes violentes des cours, qui parfois variaient de plusieurs centaines de francs dans une même Bourse, affolés, pareils à l’aiguille de la boussole au milieu d’un orage. Mais, au grand frisson qui passa, tous sentirent le commencement de la débâcle. L’Universelle baissait, le cri en courut, se propagea, dans une clameur de foule, faite d’étonnement, d’espoir et de crainte.
Dès le lendemain, Saccard, solide et souriant à son poste, relevait le cours d’une hausse de trente francs, grâce à des achats considérables. Seulement, le 5 malgré ses efforts, la baisse fut de quarante francs. L’Universelle n’était plus qu’à trois mille. Et, dès lors, chaque jour amena sa bataille. Le 6, l’Universelle remontait. Le 7, le 8, elle baissait de nouveau. C’était un mouvement irrésistible, qui l’entraînait peu à peu, dans une chute lente. On allait la prendre pour le bouc émissaire, lui faire expier la folie de tous, les crimes des autres affaires moins en vue, de ce pullulement d’entreprises louches, surchauffées de réclames, grandies comme des champignons monstrueux dans le terreau décomposé du règne. Mais Saccard, qui ne dormait plus, qui chaque après-midi reprenait sa place de combat, près de son pilier vivait dans l’hallucination de la victoire toujours possible. En chef d’armée convaincu de l’excellence de son plan, il ne cédait le terrain que pas à pas, sacrifiant ses derniers soldats, vidant les caisses de la société de leurs derniers sacs d’écus, pour barrer la route aux assaillants. Le 9, il remporta encore un avantage signalé : les baissiers tremblèrent, reculèrent, est-ce que la liquidation du 15 s’engraisserait une fois de plus de leurs dépouilles ? Et lui, déjà sans ressources, réduit à lancer du papier de circulation, osait maintenant, comme ces affamés qui voient des festins immenses dans le délire de leur faim, s’avouer à lui-même le but prodigieux et impossible où il tendait, l’idée géante de racheter toutes ces actions, pour tenir les vendeurs à découvert, pieds et poings liés, à sa merci. Cela venait d’être fait pour une petite compagnie de chemins de fer, la maison d’émission avait tout ramassé sur le marché ; et les vendeurs, ne pouvant livrer, s’étaient rendus en esclaves, forcés d’offrir leur fortune et leur personne. Ah ! s’il avait traqué, effaré Gundermann jusqu’à le tenir, impuissant, à découvert ! S’il l’avait ainsi vu, un matin, apportant son milliard, en le suppliant de ne pas le prendre tout entier, de lui laisser les dix sous de lait dont il vivait par jour ! Seulement, pour ce coup-là, il fallait sept à huit cents millions. Il en avait déjà jeté deux cents au gouffre, c’était cinq ou six cents encore qu’il s’agissait de mettre en ligne. Avec six cents millions, il balayait les juifs, il devenait le roi de l’or, le maître du monde. Quel rêve ! et c’était très simple, l’idée de la valeur de l’argent se trouvait abolie à ce degré de fièvre, il n’y avait plus que des pions que l’on poussait sur l’échiquier. Dans ses nuits d’insomnie, il levait l’armée des six cents millions et les faisait tuer pour sa gloire, victorieux enfin au milieu des désastres, sur les ruines de tout.
Saccard, le 10, eut malheureusement une terrible journée. A la Bourse, il était toujours superbe de gaieté et de calme. Et jamais guerre pourtant n’avait eu cette férocité muette, un égorgement de chaque heure, le guet-apens embusqué partout. Dans ces batailles de l’argent, sourdes et lâches, où l’on éventre les faibles, sans bruit, il n’y a plus de liens, plus de parenté, plus d’amitié c’est l’atroce loi des forts, ceux qui mangent pour ne pas être mangés. Aussi se sentait-il absolument seul, n’ayant d’autre soutien que son insatiable appétit, qui le tenait debout, sans cesse dévorant. Il redoutait surtout la journée du 14, où devait avoir lieu la réponse des primes. Mais il trouva encore de l’argent pour les trois jours qui précédèrent, et le 14, au lieu d’amener une débâcle, raffermit l’Universelle, qui, le 15, finit en liquidation à 2 860, en baisse seulement de cent francs sur le dernier cours de décembre. Il avait craint un désastre, il affecta de croire à une victoire. En réalité, pour la première fois, les baissiers l’emportaient, touchaient enfin des différences, eux qui en payaient depuis des mois, et, la situation se retournant, lui dut se faire reporter chez Mazaud, lequel se trouva dès lors fortement engagé. La seconde quinzaine de janvier allait être décisive."



Dans ce texte, les haussiers et les baissiers sont clairement deux camps délimités.
Actuellement, on assiste à une alternance: les milliardaires ne cessent de passer d'un camp à l'autre.
C'est cela qui explique le fait que le facteur Krach Boum* ait atteint le niveau 1.35.
Ce facteur extraordinairement élevé signifie qu'un haussier-baissier qui aurait joué deux fois la hausse, puis deux fois la baisse, mercredi jeudi, puis la hausse à nouveau vendredi, aurait multiplié sa mise par 1,35 en une semaine.
52 semaines à ce régime ultra-délirant multiplierait sa fortune par plus de 6 MILLIONS en une seule année.


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Sur le facteur Krach Boum, lire les deux textes

35% cette semaine : Le facteur Krach Boum (1,35) ou comment saboter l'économie mondiale pour un profit maximal.


Facteur Krach Boum, "volatilité des marchés" et réification des rapports sociaux

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